Le suicide du jeune Lucas a révélé la difficulté des établissements scolaires à combattre efficacement le fléau de l’homophobie.
Suicide de Lucas : l’inefficacité des dispositifs de lutte contre l’homophobie en milieu scolaire remise sur le tapis
Le décès de Lucas, 13 ans, a relancé le débat sur la lutte contre l'homophobie en France. Pap N’Diaye, le ministre de l’Education nationale et de la Jeunesse s’est exprimé devant le Sénat, mercredi 18 Janvier. Il a tenu à diffuser un message clair et sans ambiguïté sur les efforts à faire en matière de protection des jeunes LGBT.
"L’homophobie tue"
Le suicide du jeune Lucas, 13 ans, à Golbey, dans les Vosges, a suscité un vif émoi en France. Pour rappel, l’adolescent s'est donné la mort suite aux moqueries dont il faisait l’objet depuis son coming-out. Sa maman avait alerté l’établissement où il était scolarisé au sujet du harcèlement dont il faisait l'objet. Cela n'a pas empêché le préadolescent de commettre l'irréparable.
Interrogé au sujet de la protection des jeunes LGBT, Pap N’Diaye a déclaré que "l'orientation sexuelle [était] souvent un point d'appui des auteurs de harcèlement, comme l'apparence physique, l'origine, la condition sociale". L’on estime, en effet, que 10% des jeunes sont victimes de harcèlement chaque année en France. Le jeunes LGBT sont particulièrement victimes de ce phénomène. Santé publique France a mené une enquête sur le harcèlement subi par cette catégorie de jeunes en 2014. Elle a estimé que les jeunes LGBT avaient de 2 à 7 fois plus de chances d’être victimes de harcèlement. Dans le cas de Lucas, ce harcèlement aura mené au suicide.
Les actes de harcèlement et d’agression sur les jeunes LGBT sont en constante hausse. C'est ce que décrit, en outre, un rapport datant de 2022 de l’association SOS homophobie. Dans 63% des cas, ils sont le fait d’autres élèves de l’établissement. Étonnamment, ces humiliations peuvent aussi être le fait de la direction des établissements scolaires (26% des cas). A 21%, c'est le corps enseignant lui-même qui est coupable de ce type de pratiques.
La sincère émotion de @PapNdiaye au Sénat lorsqu’il évoque le suicide de Lucas ◾️« L'homophobie tue, oui »
📍Je plussoie pic.twitter.com/TlBzZg8TrC— BΞMBΞLLY (@bembelly) January 20, 2023
Une question (trop) souvent éludée
En France, tous les établissements scolaires sont tenus de prodiguer des séances d’EAS (éducation à la sexualité). Or il se trouve que moins de 20% des élèves choisissent d’assister aux trois séances annuelles d’EAS. De plus, ces séances n’intègrent la "prévention des LGBTphobies à leur cours d’EAS que dans 20% des cas", précise un rapport de l’inspection générale de l’éducation, paru en 2021. Interrogé par Franceinfo, Rachid, professeur d’histoire-géo, confirme et déplore cette tendance: "Ce ne sont pas des questions simples, et j'entends plein de collègues dire qu'ils n'osent plus les aborder. Il faut être armé et certains professeurs ont besoin d'outils pédagogiques, car si tu n'as pas de sensibilité pour cette question, c'est difficile d'aller au charbon".
L’Education nationale a décidé de combattre le fléau de l’homophobie chez les jeunes LGBT de manière plus incisive. Le Dispositif Phare est ainsi actif depuis 2020. Caroline Vetcheff, superviseure de ce programme à Paris, précise que ce dispositif prévoit des élèves "ambassadeurs", soit "des jeunes formés à veiller sur leurs camarades et à se tourner le cas échéant vers les adultes référents."
Confiante dans l’efficacité à terme de ce programme, elle appelle, toutefois, à la patience. "Malheureusement, ça prend du temps et on ne peut pas aller plus vite. Je comprends que ce ne soit pas audible pour les familles, les victimes. Mais il faut notamment former de nombreuses personnes".